Véhicules autonomes et équipements de la route

Des interactions au cœur de la route connectée

L’arrivée des véhicules intelligents, partiellement ou totalement automatisés, demande de revisiter la conception et l’équipement des infrastructures routières, mais aussi la régulation des flux et des modes de transport. Au centre de cette équation : les interactions entre équipements de la route et véhicules autonomes.

Lorsque le GPS est arrivé, beaucoup pensaient que les conducteurs n'auraient plus besoin de s'appuyer sur les panneaux de signalisation ou le marquage au sol. Aujourd'hui, bien qu'une majorité d’entre eux l'utilisent, notamment sur leur smartphone, il est évident que ces prédictions se sont avérées fausses. La signalisation verticale et horizontale reste indispensable à la lecture directe de la route par l'automobiliste, dont la conduite est mieux sécurisée et les indications extérieures confirmées.

Dans sa voie vers l’autonomie complète (d’ici 20 à 30 ans selon la capacité du marché à acquérir ce type de mobilité très sophistiqué), le véhicule devra interagir avec des équipements tantôt statiques, tantôt connectés, qui viendront confirmer, informer et orienter de manière de plus en plus fiable. Les premiers modèles s'équipent déjà de nombreuses technologies (caméras, lidars, radars, sonars...) qui collectent en temps réel des données sur leur environnement proche. Une fois recoupées, ces données reconstituent la route et ses situations par reconnaissance de formes. Les équipements occupent donc de fait une place centrale dans cette cartographie 3D et dans le cadre d'une route dite coopérative et de 5e génération (R5G).

Récolter, traiter, échanger : des équipements multifonctions

Les panneaux jouent un rôle d'amer en tant que points fixes installés en bord de route. Ils assurent la redondance nécessaire au véhicule autonome afin de sécuriser et confirmer son itinéraire. Les caméras embarquées lisent la signalisation, qui doit être visible par tout temps et dans n'importe quelle condition.

Les dispositifs de marquage au sol sont quant à eux un outil essentiel pour guider les véhicules autonomes : ils sont les rails de la route. Bien que statiques et passifs, tous n'en sont pas moins connectés, puisque lus et détectés par les différentes technologies qui équipent les véhicules intelligents.

Aujourd'hui déjà, certains équipements communiquent des informations tant à destination des usagers et de certains véhicules, que des gestionnaires d'infrastructures. Les unités de bords de route (UBR), les panneaux à messages variables (PMV) ou encore les feux de signalisation possèdent de telles fonctionnalités. Interconnectés entre eux grâce aux technologies « Cooperative Intelligent Transport Systems » (C-ITS), ils participent à la gestion du trafic routier. À terme, les véhicules autonomes seront connectés à ces mêmes systèmes et optimiseront leur conduite grâce à la multitude d'informations transmises à leurs logiciels d'analyse de la route. Plusieurs expérimentations sont d'ailleurs actuellement menées dans le cadre du projet SCOOP@F1.

Ces systèmes de communication, qui agrègent les données et les informations récoltées par plusieurs catégories d'équipements, contribuent à améliorer les flux et à assurer une mobilité aussi sécurisée que performante. Comptage et classification des véhicules, fluidification du trafic et calcul du temps de parcours moyen, supervision individuelle et groupée des équipements… : les différentes solutions de mixage sur une même plate-forme permettront aux gestionnaires d'infrastructures d'appréhender de nombreuses problématiques du trafic routier.

Bientôt, d'autres types d'informations et de messages apparaîtront, au sol comme sur des panneaux, à destination du véhicule comme du passager. Les équipements déjà existants pourront recevoir de nouvelles fonctions, qui viendront compléter et étoffer celles qu'ils remplissent déjà : le feu tricolore indiquera au véhicule dans combien de temps il passera au rouge et la ligne de délimitation de voies signalera un risque de verglas grâce aux capteurs thermiques dont elle sera équipée. Au niveau des carrefours et intersections complexes, des UBR pourront organiser les priorités entre les véhicules autonomes, qui eux-mêmes interagiront entre eux. Quant aux zones de chantiers, elles seront annoncées en amont, via un signal envoyé par les équipements temporaires eux-mêmes.

Des systèmes et un réseau dédiés

La conduite des véhicules autonomes s’appuie notamment sur un système d'analyse et de communication avec les infrastructures routières : le V2X, pour « Vehicle-to-Everything ». Récemment, les constructeurs automobiles se sont entendus pour concevoir un standard de communication garantissant la compatibilité des échanges entre n'importe tous les types de véhicules.

Ce système de communication « Vehicle-to-Infrastructure » (V2I) sera directement relié aux équipements de la route, qui l'alimenteront d'une multitude d'informations récoltées grâce aux technologies dont ils seront équipés (capteurs, thermomètres, senseurs…). Les échanges de données et d'informations seront réalisés selon la norme IEEE 802.11p, sorte de wifi dédié à la route, d'une grande réactivité, d'un haut niveau de sécurité et fruit de plus de dix ans de travaux de normalisation. D'autres signaux pourront être émis grâce à la l'utilisation du réseau 5G, actuellement en pleine phase de déploiement.

En effet, les radars et lidars des véhicules autonomes ayant une visibilité restreinte (de 100 à 200 mètres), ils devront s'appuyer sur les équipements de la route afin, par exemple, d’alerter l’usager au sujet d'un accident ou d'un embouteillage en amont, de l'approche d'un véhicule prioritaire, des temps de phases des feux tricolores... Ils offriront ainsi au véhicule une perception avancée de la route.

Interagir pour mieux entretenir

Assurer tant la sécurité que l'information et le guidage des véhicules autonomes présente une signalisation bien entretenue, conforme et de qualité, résultat d'une gestion rigoureuse et dynamique du patrimoine routier. Toutefois, en France, à l'heure actuelle, 50 % des routes ne possèdent pas de marquage au sol et 40 % du parc de la signalisation verticale est estimé non-conforme.

Il est donc urgent que soit mis en place un plan national de maintenance de ces équipements. Pour y contribuer, des solutions de maintenance prédictive peuvent être développées : s'appuyant sur un logiciel embarqué d'imagerie 3D, des équipementiers ont mis au point des systèmes d'analyse et de cartographie des infrastructures routières. Marquages, panneaux, dispositifs de sécurité... tous les équipements statiques et leur état peuvent être analysés en temps réel. Les informations collectées sont alors transmises au gestionnaire afin qu'il intervienne de manière ciblée, adaptée et rapide pour remplacer ou réparer un équipement. C'est un gain plus que significatif tant en matière d'optimisation des services et des coûts que de réduction de l'impact environnemental.

Les véhicules autonomes contribueront eux aussi à la maintenance des équipements qui leur serviront de repères et de guides. Leurs caméras et lidars, qui analyseront la signalisation, pourront détecter les équipements défaillants, endommagés ou dégradés. Une alerte géo-localisée sera alors envoyée directement aux gestionnaires pour qu'ils interviennent rapidement. Mieux utiliser la route, mieux répartir le trafic, mieux gérer les vitesses... sont par ailleurs autant de solutions qui contribueront à améliorer la longévité des infrastructures et des équipements.

Interactions entre équipementiers

Inexistant il y a encore quelques années, un dialogue est aujourd’hui possible entre les équipementiers de la route et de l'automobile. Il est d'abord le résultat d'un constat : les véhicules autonomes ne pourront circuler de manière absolument fiable que sur des infrastructures adaptées et donc, aussi, grâce à une nouvelle génération d'équipements et de dispositifs de signalisation.

Les discussions portent actuellement sur l'échange d'informations entre les équipements et les logiciels embarqués des véhicules, ou encore la lecture du marquage et des panneaux. À ces besoins précis exprimés par les acteurs de l'automobile, les membres du Syndicat des équipements de la route (SER) apportent des solutions globales.

 

Références
1 M.-C. Esposito, L. Bessou, « SCOOP@F : projet de déploiement pilote d’ITS coopératifs en France », RGRA n° 932, décembre 2015.
2 G. Ségarra, « Les applications au service de la sécurité », RGRA n° 932, décembre 2015.